22 Avr Loi El Khomri: du projet de loi à sa mise en application dans une DRH
Le projet de loi El Khomri sur la réforme du travail ne cesse d’évoluer. Proposé à l’origine pour relancer la croissance et l’emploi, il est pourtant à craindre que cette loi générera de nombreuses difficultés au sein des entreprises. La mise en pratique nécessitera, en effet, un gros travail de négociation et de réflexion pour les Directions des Ressources Humaines.
- Evolution des heures supplémentaires
- Evolution sur le licenciement
- Evolution sur le temps de travail
- Développement de l’emploi
- Evolution sur la formation
- Plan jeunesse
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Le projet de loi El Khomri : quelles sont les évolutions ?
Le projet ouvre des évolutions sur 6 volets :
1. Evolution des heures supplémentaires
Sur celui des heures supplémentaires, le taux de majoration sera désormais soumis à accord d’entreprise ou, à défaut, au niveau de la branche. Ce taux pourra ainsi être baissé jusqu’à 10% (même si un accord de branche stipule un taux plus élevé).
Cela ne représente pas de grandes conséquences en termes d’implémentation dans un SIRH à première vue mais qui dit accord d’entreprise, dit négociation, et qui dit négociation, dit compromis.
Le taux de 10% étant un seuil, rien n’empêche une négociation du taux selon tel ou tel critère.
Une mécanique qui peut rapidement complexifier sa mise en œuvre. Charge ensuite aux outils de qualifier les critères et déclencher le taux correspondant.
2. Evolution sur le licenciement
Le second volet concerne l’assouplissement des règles en matière demotif de licenciement. Cet assouplissement aurait pour conséquence de diminuer la masse de ruptures conventionnelles (165000 pour le seul premier semestre 2015 selon le Figaro).
L’autre nouveauté est l’appréciation des résultats de l’entreprise en difficulté au niveau groupe et non plus au niveau de la structure française. La complexité sera reportée vers des institutions qui devront se plonger dans les comptes des groupes internationaux.
Le projet de loi instaure également un barème dans le traitement de l’indemnité octroyée par le tribunal prud’homal. La justice y verra certainement une ingérence malvenue, les entreprises pourront calculer leurs provisions au plus juste mais les salariés en revanche, et particulièrement les plus anciens, verront certainement leurs indemnités revues à la baisse.
3. Evolution sur le temps de travail
Sur le temps de travail, l’assouplissement passera également par des accords d’entreprise.
Ainsi, les entreprises de moins de 50 salariés pourront désormais bénéficier de forfait-jour, c’est-à-dire un volume de travail calculé annuellement en fonction d’un nombre de jours travaillés et non plus par heures.
L’accord pourra être négocié individuellement; chaque salarié souhaitant bénéficier d’un forfait-jour pourra directement en discuter avec son employeur.
Sans la protection d’une branche ou d’un accord collectif d’entreprise, il est difficile de voir le bénéfice que pourra en tirer le salarié.
Par ailleurs, la mise en place de forfait-jour nécessite des contrôles et un suivi particulier par l’employeur afin de respecter le droit du travail.
4. Développement de l’emploi
Le projet de réforme tient aussi son lot de nouveautés inédites avecl’accord de développement de l’emploi. En résumé, c’est un accord sur deux ans maximum qui permet de négocier le temps de travail et les salaires pour la conquête de nouveaux marchés.
Les salariés prendraient ainsi part ou en tout cas porteraient les conséquences des choix stratégiques de l’entreprise. Pour le moment, la réforme n’en dessine pas les contours car les modalités et la définition de ce que représente la conquête d’un nouveau marché ne sont pas encore précisées ni les institutions de contrôle et les recours d’accords abusifs.
La loi El Khomri : quel impact sur la formation et le recrutement ?
Au nom de la stratégie d’entreprise, les salariés pourront voir leur salaire diminuer ou leurs heures de travail augmentées.
Cette modulation, qu’elle soit liée à la rémunération ou au temps de travail, nécessitera du temps pour la négociation des accords et sa mise en œuvre. Les salariés pourront toutefois refuser l’accord d’entreprise mais dans ce cas ils pourront faire l’objet d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse.
La négociation des accords d’entreprise pourra être facilitée par le système de référendum. Avant le projet de réforme, un syndicat avec plus de 50% des voix pouvait bloquer un texte même si la majorité des salariés y était favorable. Désormais, une entreprise pourra contourner un grand syndicat à condition toutefois de s’appuyer sur un syndicat pesant au moins 30% des suffrages.
5. Evolution sur la formation
Un autre volet important concerne le CPA (Compte Personnel d’Activité). Il est certainement la réelle avancée sociale de ce projet de réforme.
Les salariés pourront consulter leurs droits à la formation et leurs droits liés à la pénibilité de leur emploi à travers un compte accessible en dehors de l’entreprise et qui les suivra tout au long de leurs carrières. Reste à la charge de l’entreprise d’envoyer les données.
Les DRH devront faire le nécessaire pour envoyer à travers des flux dématérialisés de la DSN les indicateurs de pénibilité de l’emploi. Six indicateurs sont d’ores et déjà en vigueur mais leurs calculs sont loin d’être simples.
Depuis les lieux opérationnels des activités de l’entreprise, la Direction des Ressources Humaines doit également s’assurer :
- De la rigueur du suivi ;
- De l’exhaustivité ;
- de la qualité des données remontées.
Certaines DRH ayant déjà entrepris un travail de digitalisation pourront récupérer plus ou moins facilement de l’information. Le numérique n’est plus une option, il est impossible d’envisager la remontée de ce type d’information sous format papier.
6. Plan jeunesse
Outre ce projet de loi, le gouvernement planche également sur unplan jeunessedont le but est de favoriser les jeunes les moins aisés. Un plan fait en urgence probablement suite aux récentes manifestations.
Il va coûter très cher à l’Etat mais aussi et surtout aux entreprises où chaque réforme apporte son lot de taxes. Ainsi des taxes sur les CDD et l’augmentation des salaires des apprentis devraient voir le jour (source les Echos).
Au final, ce projet de loi, dans sa formulation actuelle, risque de mettre les nerfs des DRH à rude épreuve.Dans un premier temps par le volet des négociations, et dans un second temps sur leur mise en place à travers les outils permettant d’automatiser les règles validées lors des négociations.
Certes, la digitalisation donne l’opportunité aux DRH de se positionner sous un angle d’analyse plutôt que de production de données mais la multiplication et la complexité des informations à fournir les forcent à rester constamment en mode projet avec de constantes évolutions pour s’adapter aux exigences des pouvoirs publics, à la stratégie de l’entreprise, tout en restant proche des collaborateurs.
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